La technologie
en optique a beaucoup évolué ces 15 dernières années. Nous allons parler dans
ce premier billet de l’évolution des technologies de fabrication des
instruments en optique, comme par exemple les lunettes d’astronomie ou les
télescopes. Les formes à réaliser sont bien sûr connues depuis très longtemps.
Le premier exemple de réalisation est la lunette de Galilée contenant des
lentilles. Newton a proposé une évolution qui est celle du télescope en
utilisant un miroir évitant les défauts des lentilles à son époque : les
images étaient parfois fortement irisées avec une lunette. Afin d’avoir la
meilleure image possible, les lentilles ou les miroirs doivent avoir un état de
surface d’excellente qualité. La rugosité de ces surfaces, c'est-à-dire les
imperfections, doivent être très inférieures à la longueur d’onde de la lumière
afin que la forme joue bien son rôle de « rediriger » la lumière au
bon endroit. Prenons l’exemple des télescopes qui permet de regarder les
étoiles au loin dans l’univers. Il existe aujourd’hui de nombreuses
configurations possibles avec un ou plusieurs miroirs pour obtenir un télescope
performant.
La plus connue (et la plus courante pour un produit "grand public") est justement le télescope dit "de Newton". Le principe consiste à utiliser une parabole comme forme pour le miroir principal afin de former une image de l’objet observé. Une forme « sphérique » du miroir n’est pas réellement suffisante sauf dans des conditions bien précises. Ne rentrons pas dans les détails de la théorie de la formation des images à travers un instrument d’optique. Parlons plutôt de comment réaliser cette parabole. Le principe consiste à utiliser 2 blocs de verre et des « grains » entre les blocs afin de « tailler » et de « polir » les surfaces et de s’approcher de la forme parabolique idéale. Ce processus de fabrication peut se faire avec des moyens très simples, bien connus des astronomes amateurs. Grâce à des méthodes graphiques et de calculs analytiques, une configuration d’un télescope quasiment parfait a été proposée en 1910 par G.W. Ritchey et H. Chrétien, puis réalisée près de 20 ans plus tard. En effet, cette configuration est beaucoup plus compliquée à fabriquer que le télescope de Newton : elle utilise deux miroirs avec des formes dites « hyperboliques ». C’est un bon exemple où le concept théorique existait bien avant le moyen technologique pour le réaliser et le tester.
Au cours des 15 dernières années,
les fabricants ont réussi à améliorer de manière continue les procédés de
fabrication en utilisant de mieux en mieux des machines à commande numérique et
la Conception de Fabrication Assistée par Ordinateur (CFAO). Ils ont donc pu
proposer des « formes » de plus en plus complexes pour les miroirs
des télescopes avec des coûts de fabrication et de production de plus en plus
raisonnables. C’est pourquoi on peut trouver aujourd’hui dans des catalogues
des télescopes de type Ritchey-Chrétien de petit diamètre et avec des coûts
honnêtes, mais aussi des configurations
étonnantes comme celle proposées permettant d’observer un très
grand champ du ciel (la configuration dite Rowe-Ackermann) avec un télescope compact.
La liste de nouveautés est très longue : ces nouveaux produits sont justement le fruit de nombreuses évolutions dans le domaine de la technologie optique, mais aussi mécanique depuis le début de 21ème siècle.
Mais je veux aussi aller plus loin dans ma courte présentation de ce sujet : des travaux actuels en recherche veulent justement faire évoluer « les formes » des miroirs pour toujours améliorer la qualité des images obtenues. Notez également que les capteurs d’images numériques ont aussi beaucoup été améliorés depuis leur apparition au début des années 70 : ils sont aujourd'hui très sensibles au moindre défaut de l’optique. Ainsi, si la configuration optique ne donne pas des étoiles parfaitement ponctuelles mais une « patate », le capteur numérique va enregistrer ce « mauvais » résultat. Ce domaine des nouvelles « formes » de surfaces optiques est appelé « free form » qui veut littéralement dire « forme libre » (voir figure 1). Ce domaine de la technologie optique est apparu, il y a peu de temps, surtout aux Etats-Unis.
On peut lire deux articles en anglais qui présentent cette révolution chez l'organisation américaine spie ou dans la revue Optics & Photonics News.
Il y a de nombreux avantages
de ces « free forms » : une nette amélioration de la qualité d’image
sur tout le champ d’observation, une compacité du système optique mais aussi la
faible sensibilité aux positionnements des composants optiques sur le plan
mécanique (donc moins de sensibilités aux réglages). Des tentatives avec des
configurations de télescopes ont été proposées par les auteurs précédents avec
succès. Gageons que dans moins de dix ans, l’industrie de la technologie
optique pourra proposer avec ces nouvelles surfaces très innovantes des
produits pour le grand public : cela permettra d’obtenir des images toujours
de plus en plus belles, « fines » et « piquées » du ciel nocturne
avec les avantages cités.
Figure 1: un exemple didactique de free-form. Cette surface serait définie seulement par des polynômes simples.
Références :
K. P. Thomson, J. K Rolland, “Freeform Optical Surfaces: A Revolution in Imaging Optical Design”
doi : 10.1364/OPN.23.6.000030
Figure 1: un exemple didactique de free-form. Cette surface serait définie seulement par des polynômes simples.
Références :
K. P. Thomson, J. K Rolland, “Freeform Optical Surfaces: A Revolution in Imaging Optical Design”
doi : 10.1364/OPN.23.6.000030
J. P. Rolland, K. P. Thomson, “Freeform
optics: Evolution? No, revolution!” doi : 10.1117/2.1201207.004309