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9 déc. 2015

Quel beau miroir...

Nous avons déjà discuté à plusieurs reprises de comment on caractérise en théorie un système optique, comme les lunettes pour l’astronomie par exemple (c'est-à-dire les réfracteurs, voir le billet sur la P.S.F). Dans le cas des miroirs dans un télescope, on mesure et on donne en fait un autre paramètre essentiel un peu différent que le « strehl ratio ». 

On mesure grâce à différentes techniques (généralement on utilise des montages optiques dédiés) l’état de surface du miroir. En effet, dans la plupart des instruments sous forme des télescopes, on utilise une forme parabolique réalisé par polissage (nous en avons déjà parlé dans les premiers billets de ce blog). En fait à cause de problèmes liés à la technique de polissage (et surtout dans le cas industriel), il est très rare d’arriver à un état de surface qui est très proche de la courbe idéale (c’est un peu logique à cause de la précision des machines polisseuses utilisées). 

On dépose en fait sur la surface polie de verre une fine couche d’un métal très réfléchissant dans le cas d’un miroir. En général, c’est une couche d’aluminium déposée dans une cloche à vide par évaporation, puis éventuellement on réalise des traitements supplémentaires pour éviter la détérioration à long terme de la couche de métal réfléchissante. Donc, ce dépôt permet de faire « réfléchir » un maximum de lumière, mais épouse aussi les aspérités de la surface polie, donc les défauts. Si l’état de surface est très rugueux, en fait l’image sera totalement bruitée en sortie, c'est-à-dire quasiment impossible à distinguer dans le bruit environnant lumineux .

Ces défauts de surface (« la rugosité ») perturbent la propagation de la lumière incidente et modifie en fait l’onde incidente arrivant dans le télescope : l’image sera alors détériorée. Les défauts dans l’image sont appelés « aberrations ». On peut citer une aberration bien connue et assez facilement observable. Il suffit de mettre une étoile bien brillante en bord de champ et on a l’impression de voir une comète ou une étoile très allongée. C’est l’aberration de coma très difficile à annuler. Il existe des aberrations bien connues qu’un œil exercé peut facilement détecté sur une image. Ici nous parlons que des aberrations générées par la mauvaise réalisation technologique.

Ces aberrations sont par exemple dues au fait que la courbe réelle d’un miroir « s’écarte » du cas idéal. Si un fabricant vous dira que votre miroir est « taillé » à λ/10, cela signifie que la courbe réelle s’écarte de λ/10 de la courbe idéale. En principe, λ est la longueur d’onde de la lumière centrale du spectre visible, soit 550 nm donc l’état de surface du miroir est à 55 nm près. Il faut évidemment demander la longueur d’onde à laquelle le fabricant fait la mesure (cela dépend de la source de lumière utilisée, par exemple 633 nm pour un laser He-Ne ou 514 nm pour un laser Argon). En toute rigueur, l'écart sera mesuré par la différence entre un front d'onde incident plan et un front d'onde réfléchie par le miroir sur un banc optique par exemple.

Un polissage de qualité faible (c'est à dire de l'ordre de la longueur d'onde du visible) sera peu utile. L’instrument sera ici loin d’être exploitable pour faire de l’imagerie, mais pour d’autres applications en optique, cela peut être suffisant. Il existe aussi un autre critère utilisé en optique "imageante", qu’on appelle le critère de Maréchal pour caractériser la qualité optique d’un miroir par exemple (il s’utilise comme critère de qualité optique dans plusieurs applications liées à l’imagerie). Le critère de Maréchal dit que l’état de surface d’un miroir doit être au moins de λ/14 en valeur rms et lλ/4 peak to valley. (Le terme rms veut dire « écart quadratique moyen » et peak to valley « pic vers la vallée »).

Figure 1 : la courbe en pointillée est la courbe idéale du front d'onde. La courbe en trait continu est la courbe réelle. En mesurant le rapport λ/n en valeur rms, on a une information sur l'écart entre les deux courbes.

En général, le plus simple est le peak to valley (noté par p-v) à mesurer : c’est la hauteur entre le pic le plus élevé de la surface avec le creux le plus profond de la surface, mais il renseigne mal sur la qualité de l'image car il dépend du profil théorique du miroir. Lors de l’achat d’un miroir, il faut donc demander quel est l’écart effectivement mesuré (rms ou p-v) pour avoir un état de surface suffisant : la valeur rms étant plus intéressante pour caractériser un miroir et doit être à supérieure à λ/14 pour une bonne qualité d'image. Le fabricant peut aussi donner le "strehl ratio" du miroir seul (qui doit être supérieure à 0,95 pour une très bonne optique de préférence). Il faut aussi savoir que certains fabricants peuvent proposer des états de surface bien plus élevés que ce critère de Maréchal : cela diminue au mieux les aberrations, mais n’enlève pas les aberrations inhérentes à la configuration optique qui subsistent toujours. 

Nous reviendrons dans un prochain billet sur la notion d’aberrations…

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